Cimetière de Charonne : histoire, patrimoine et visite du plus bucolique des cimetières parisiens

Un jour d’automne, alors que je cherchais un coin tranquille pour échapper un moment au tumulte parisien, un ami m’a parlé d’un petit cimetière caché dans le 20ᵉ arrondissement. « C’est comme un village dans la ville », m’a-t-il soufflé. Curieux, j’ai pris la rue de Bagnolet et j’ai découvert un lieu à part, suspendu entre les siècles : le cimetière de Charonne. Rien à voir avec le Père Lachaise, bruyant de touristes et de corbeaux poétiques : ici, c’était le calme absolu, le bruissement léger des feuilles et cette impression délicieuse d’avoir remonté le temps.

Un voyage au cœur d’un passé villageois préservé

Le cimetière de Charonne t’embarque dans un Paris que l’on devine à peine sur les cartes. À l’origine, on est au cœur du Moyen Âge. Le lieu servait de cimetière paroissial pour le village de Charonne, accolé à la jolie église Saint-Germain-de-Charonne. Et cette proximité n’a rien de hasardeux. À l’époque, enterrement et spiritualité se vivaient côte à côte. Les défunts dormaient aux pieds des clochers, veillés par les prières des vivants.

Quand Napoléon décrète en 1804 que plus personne ne reposera dans Paris même, la plupart des cimetières autour des églises finissent rayés de la carte. Mais ici, miracle administratif ou chance géographique, le lieu est épargné. Pourquoi ? Parce que Charonne n’était pas encore Paris, mais une commune indépendante. Et surtout, ce coin rural était déjà un peu à l’écart de la ville. Il devient communal en 1791 et s’étend doucement, en 1845 puis en 1859, pour accueillir un peu plus de 650 défunts. En 1860, Charonne entre dans Paris et son petit cimetière aussi, désormais géré par la Ville. C’est ainsi qu’une parcelle médiévale de verdure connaît une seconde vie au cœur de la modernité parisienne.

Un écrin miniature où la nature tient la main à l’histoire

Ce qui saisit d’abord, c’est la taille : à peine 0,41 hectare. Oui, tu as bien lu. C’est le deuxième plus petit cimetière de tout Paris. On pourrait presque le rater en marchant trop vite. L’entrée principale t’accueille rue de Bagnolet, mais les connaisseurs préfèrent celle du chemin du parc de Charonne, plus discrète. Une fois franchies les grilles, on est dans un autre monde.

Des allées bordées d’érables, un silence parfois troublé par le chant d’un merle ou la brise dans les arbres. Le sol n’est pas toujours plat et les allées ne sont pas toutes accessibles, mais cela participe au charme un peu rustique du lieu. On sent l’ancien village maraîcher derrière les murs. C’est un peu comme feuilleter les pages jaunies d’un carnet de souvenirs.

Le cimetière et plusieurs tombes ont été classés monuments historiques. Cette décision protège non seulement la pierre mais l’âme du lieu. Et quelle âme ! Si les grands cimetières de Paris peuvent impressionner ou écraser, celui-ci te murmure des histoires, t’invite à flâner sans but précis.

Des sépultures qui racontent plus que de simples noms

Tu pourrais passer à côté de certaines tombes sans en deviner la portée. Et pourtant, elles racontent toutes quelque chose. Parfois l’histoire d’une époque, parfois une tragédie intime ou une vie hors norme. Voici quelques-unes de ces vies gravées dans la pierre :

  • Les fils d’André Malraux, morts tragiquement dans un accident de voiture, reposent ici avec leur mère Josette Clotis. Une douleur familiale silencieuse.
  • Gérard Bauër, plume aiguisée et habitué du Figaro littéraire.
  • Pierre Blanchar, acteur célèbre qui fit vibrer les planches et l’écran.
  • Robert Brasillach, figure controversée de la littérature, exécuté à la Libération pour collaboration. Sa présence crée toujours un frisson d’ambiguïté.
  • François Bègue dit « Magloire » : un mythomane touchant qui prétendait avoir été le secrétaire de Robespierre. Sa pierre tombale affiche une statue de… Jean-Jacques Rousseau. Oui, un cimetière peut aussi faire sourire.

Tu l’auras compris, ici les anonymes reposent à côté des figures publiques, comme dans une dernière agora. Et ce qui frappe, c’est l’humanité simple que dégagent ces sépultures modestes.

Préparer sa visite : un lieu paisible facilement accessible

Bonne nouvelle, visiter le cimetière de Charonne ne demande ni boussole ni réservation. À noter les infos clés :

Information Détail
Adresse 119 rue de Bagnolet 75020 Paris
Coordonnées GPS 48.8609, 2.4035
Horaires Du lundi au vendredi : 8h à 17h30
Dimanche : 9h à 17h30
Accessibilité Accès personnes handicapées partiel, toilettes publiques à 169 rue des Pyrénées
Contact Géré par le service du cimetière du Père-Lachaise (via site de la Ville de Paris)

Prends un bon carnet si tu es du genre à noter ce que les lieux t’inspirent. Et surtout, viens avec l’esprit ouvert. Ici, il ne s’agit pas d’un circuit touristique classique, mais d’un moment hors du temps à savourer calmement.

Un trésor patrimonial discret qui mérite d’être mieux connu

À Paris, rares sont les endroits où le passé rustique se lit encore dans les murs. Avec le cimetière du Calvaire à Montmartre, celui de Charonne est le seul à être encore accolé à une église. Une rareté patrimoniale précieuse.

C’est un lieu parfait pour le tourisme de mémoire. Ici, rien ne hurle à l’héroïsme ou à la grandeur. On se promène plutôt dans la modestie de ceux qui ont compté pour peu, mais assez pour quelqu’un. Chaque pierre raconte un morceau d’histoire, chaque allée trace un chemin entre le monument religieux et la mémoire collective. Il y a une forme de tendresse dans cet équilibre entre spiritualité simple et vie ordinaire.

Et si une visite t’inspirait une anecdote ou une émotion que tu n’attendais pas ? Car ce lieu, mine de rien, touche souvent plus que prévu. Peut-être parce qu’il nous rappelle que le temps passe sans bruit, comme les feuilles d’automne dans une allée oubliée de Paris.

Et si tu t’accordais une parenthèse poétique dans Paris ?

Le cimetière de Charonne n’est pas un lieu que l’on visite en cochant une case. C’est une échappée. Une invitation à poser le téléphone, marcher doucement et prêter l’oreille à ce que racontent les pierres. On y vient pour apprendre, se recueillir ou simplement respirer.

Et si tu te demandais ce que cache encore Paris derrière ses murs ? Quel autre bout de campagne il reste à découvrir dans la capitale ? Commence peut-être par ici. Emmène un ami, un carnet ou juste ta curiosité. Les cimetières ne sont pas toujours tristes. Certains savent offrir, comme celui-ci, un moment précieux de paix, de souvenirs et de beauté.

Alors la prochaine fois que tu passes près de la rue de Bagnolet, lève les yeux. L’église Saint-Germain t’attend. Et derrière elle, un petit monde à part.

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